De manière générale, quelle est la situation des femmes dans la société ces dernières années?

Malheureusement la situation est préoccupante. Les politiques conservatrices radicales entravent les progrès recensés dans certains domaines, y compris celui des droits des femmes. Les États-Unis en sont un exemple actuel flagrant. Selon l’ONU, l’objectif de développement durable (ODD) 5 – l’égalité des sexes – à atteindre d’ici à 2030, est compromis. C’est aussi ce que SWISSAID constate à travers son travail dans ses pays partenaires.

A quoi cela est-il dû?

Les crises sanitaires, climatique et humanitaires de ces dernières années coïncident avec une recrudescence de la violence envers les femmes, particulièrement dans les régions rurales. Des études révèlent que les femmes se sentent moins en sécurité qu’avant la pandémie (UN Women, National post, ABC News). Cette situation est due à plusieurs facteurs, tels que le stress généré par la hausse des prix et le système inégalitaire de revenus sur lequel repose de nombreux foyers. Particulièrement lorsqu’il n’y a qu’un revenu par foyer, la précarité entraîne souvent de la violence domestique.

Comment SWISSAID lutte-t-elle concrètement contre ces difficultés?

Pour SWISSAID, l’objectif d’égalité des genres – c’est-à-dire des rapports de force égaux et équitables entre les individus – reste central dans son engagement. Nous soutenons des projets et des organisations qui luttent pour l’égalité dans tous nos pays d’intervention. Ces dernières années, de plus en plus de projets axés sur l’autonomisation des femmes ainsi que l’intégration des hommes à la coresponsabilité ont été lancés et financés avec succès. Les réussites observées dans certains pays ont ensuite été transférées et adaptées à d’autres pays. Par exemple, la sensibilisation contre la violence à l’égard des femmes et des filles en Inde et en Colombie est désormais répliquée au Niger et en Équateur. Bien que les mentalités changent lentement, nous constatons déjà des évolutions positives.

Et au niveau politique?

SWISSAID apporte également un soutien considérable aux organisations de femmes en renforçant leurs infrastructures et les membres qui les composent, notamment par des cours d’alphabétisation ou de gestion de budget. Fortifier les réseaux féminins existants est le travail le plus durable qu’on puisse faire. C’est par exemple le but d’un nouveau projet lancé au Tchad en partenariat avec UN Women ou du lancement d’une plateforme sur l’agroécologie au Niger.

Et quel rôle jouent les hommes?  

Les hommes sont bien évidemment essentiels à l’émancipation des femmes. Chacun de nos projets intègre d’ailleurs leur participation.  En les sensibilisant à l’importance de l’autonomie des femmes, et l’impact que cela peut avoir sur le revenu, la société ou l’éducation des enfants, ils sont plus réceptifs à encourager cette évolution. Au Niger par exemple, des groupes d’hommes sont créés pour discuter de différents aspects des inégalités, comme l’écart entre l’emploi du temps des hommes et des femmes. La prise de conscience des conséquences néfastes de ces inégalités sur toute la société a poussé beaucoup d’hommes à soutenir leurs femmes dans leurs tâches quotidiennes. Cette aide supplémentaire réduit la charge de travail domestique des femmes et leur permet ainsi de se consacrer à d’autres activités, comme la vente de leurs produits sur le marché, ce qui augmente le revenu des ménages.

Tous nos pays partenaires sont-ils au même niveau dans l’égalité ou y a-t-il de grandes disparités?

Il existe de grandes disparités tant au niveau des pays qu’au niveau des différents aspects d’inégalité. SWISSAID a une approche locale. Chaque projet est unique à la situation. Avant la mise en place d’un un projet, il y a de nombreuses discussions avec les partenaires sur le terrain et la population locale, et les données nationales sont prises en compte. Ainsi, au Myanmar, au Tchad et en Guinée-Bissau, l’accent est mis sur l’autonomisation économique des femmes. En Colombie, en Équateur et en Inde, les projets vont plutôt porter sur la lutte contre la violence envers les femmes.